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Tokyo Vient De Capituler, L'Asie Craque, L'Europe A Genoux

Le CAC 40 aligne une troisième semaine consécutive de baisse

à l'issue d'une série de séances particulièrement chaotiques, pendant lesquelles replis et hausses de plus de 2% -- en intraday mais pas en clôture -- se sont succédés à un rythme effréné.

La journée de vendredi
dernier fut des plus emblématiques de ce phénomène d'instabilité -- avec un syndrome des "portes de saloon" : plus de 3% d'écart en valeur absolue entre les extrêmes de séance, écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.

Le décalage maximum des cours s'est quant à lui matérialisé en moins d'une heure !

Wall Street, qui a perdu 2% en moyenne, flirtait vendredi à mi-séance avec des niveaux de rupture de premier ordre après que Bear Stearns se soit vu contraint d'annoncer sa demande de recapitalisation d'urgence auprès de JPMorgan et de la Fed de New York, confirmant ainsi les rumeurs de difficultés de trésorerie qui circulaient depuis le vendredi de la semaine précédente.

L'incendie qui a fait rage sur les cours de bourse vers 15h -- il s'est produit un véritable effet blast -- semblait en partie maîtrisé à l'heure du déjeuner (sur la côte Est des Etats-Unis). Quant au Dow Jones, il perdait 1,75% et se battait vainement depuis 17h (heure française) pour rester au contact du seuil des 12 000 points tandis que le S&P 500 voyait son repli se creuser entre -2,3 et -2,5% et se rapprocher des -2,8% affichés vers 15h05.

Au lendemain de la faillite de Carlyle Capital Corp., l'avis de détresse de Bear Stearns -- qui reconnaît que les conditions se sont fortement dégradées au cours des dernières 24 heures, en contradiction totale avec son communiqué officiel de mercredi dernier qui affirmait l'inverse -- constitue l'incident de trop ; la chute de 45% du titre a plombé toutes les financières américaines.

Techniquement, la banque en difficulté va obtenir de JP Morgan Chase une ligne de crédit garantie par la Fed pour une période de 28 jours, de façon à lui donner accès à la liquidité dont elle manque.

Bear Stearns est le premier établissement d'une telle notoriété à entériner une situation technique de banqueroute qui serait avérée si la communauté financière ne faisait pas jouer les mécanismes de solidarité.

L'effet Bear Stearns a littéralement assommé les acheteurs qui avaient réussi à propulser le CAC 40 au dessus des 4 700 points après les "bons" chiffres des prix à la consommation aux Etats-Unis qui seraient demeurés stables -- un peu miraculeusement -- en février. Sur un an, l'inflation américaine se limiterait à 4%, après 4,3% au mois de janvier. Hors énergie et alimentation, les prix à la consommation sont également restés stables au mois de février, après une hausse de 0,3% sur le premier mois de l'année.

Toujours au sujet de l'inflation, l'indice des prix dans la Zone euro s'établissait à 3,3% en février 2008, contre 3,2% en janvier, selon Eurostat -- qui a ainsi révisé en hausse de 0,1 point son estimation initiale. Un an auparavant, le taux d'inflation était ressorti à 1,8%.

Mais ces chiffres ont été bien vite oubliés lorsque le CAC 40 a rechuté jusque sur le plancher du 10 mars, vers 4 545 points, avant de réduire son repli à 0,82% (à 4 592 points). Cette remontée s'est avérée trop laborieuse pour éviter que le bilan hebdomadaire ne ressorte négatif de 0,5%... mais cela valait mieux que les -1,5% observés vers 15h.

Les autres places européennes connaissaient des parcours similaires avec une chute puis un rebond. Ainsi Francfort perdait 0,75% et Londres 1% alors que l'Eurotop 100 affichait 1,2% de repli, pour un score global voisin de -0,86% sur les cinq dernières séances.

Parmi les principaux replis observés au sein du CAC 40, on retrouve naturellement des valeurs financières. Cependant, les valeurs dites défensives ont été tout aussi lourdement attaquées, à l'image de Sanofi-Aventis (-2,9%), France Télécom (-1,8%) ou Gaz de France (-1,1%).

Sur l'ensemble de la semaine, les principales victimes s'avèrent être des "valeurs dollar" comme le démontre la chute de 9,9% d'EADS, qui est resté stable vendredi, de 8,1% de Rhodia, plombé par l'envolée des matières premières, et de 6,6% pour Lagardère (via EADS). Suit ensuite un peloton compact, qui a perdu autour de 5,3%, formé d'Alcatel-Lucent, ST-Micro, Nexans et Sodexho.

Sur le marché des devises, chaque séance a constitué une nouvelle étape de la débâcle du dollar face à la monnaie unique. L'euro a inscrit un nouveau plus haut tout près de 1,57 dollar, à 1,5687 vendredi dernier. Cependant, l'élément le plus inquiétant réside dans l'envolée du yen au-delà des 101,5 $ dès mercredi puis des 99,6 $ vendredi dernier.

Détenir du dollar ne rapporte en effet plus grand' chose : le rendement des T-Bonds américains s'effondre suite à une fuite effrénée vers la qualité.

Les T-Notes à deux ans affichent un rendement microscopique de -1,5% tout rond... alors que le taux directeur devrait être abaissé à 2,5% mercredi prochain et les T-Notes à 10 ans voient leur rémunération fondre sous les 3,40%.

Le cours du pétrole repassait vendredi sous les 110 dollars avec un baril s'échangeant autour de 109,5 dollars. L'once d'or, de moins en moins concurrencée par les rendements obligataires, amplifiait son statut de refuge face à l'érosion monétaire et pulvérisait un nouveau record absolu à 1 005 $.

Notons enfin que si Tokyo devait servir de précurseur à la tendance sur les places occidentale, il y aurait quelques motifs de se montrer pessimiste alors que le Nikkei a pulvérisé le support majeur long terme des 12 350 points.

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Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Directeur de la rédaction aux Publications Agora et intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la 'voix' de l'actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002. Analyste technique et arbitragiste de formation, il fut en France l'un des tout premiers 'traders' mais également formateur de spécialistes des marchés à terme.

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