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Nouvelle Ruée Vers l'Or en Californie (I)

Nous vous offrons aujourd'hui un petit voyage

au coeur de la Californie où la crise économique bat son plein, écrit Emmanuel Gentilhomme pour L'Edito Matières Premières. Faut-il y voir un lien avec l'incroyable "gold rush" qui s'y déroule depuis quelques mois ?"


Du californian dream
au californian disaster
Le 3 mars dernier, l'éditorialiste Bruno Bertez écrivait dans les colonnes d'un quotidien de Lausanne ce que vous ne lirez pas dans les pages de ses concurrents parisiens : "nous vous avons quitté le 10 février pour un voyage de deux semaines aux Etats-Unis. Deux semaines en Californie plus précisément. La Californie est l'état le plus touché, globalement, par la crise de l'immobilier. C'est aussi l'un des états où la question de l'élargissement des déficits des comptes publics est la plus grave ".

Et il poursuit : "les faillites des promoteurs immobiliers se multiplient, les parkings destinés à accueillir les automobiles dont les propriétaires ne peuvent payer les traites sont insuffisants, on en ouvre de nouveaux. Beaucoup de ménages des classes moyennes continuent d'essayer de payer leurs dettes et de maintenir leur crédit (...), mais le resserrement des critères et l'abaissement du plafond des cartes de crédit rendent la tâche très difficile". Bref, le Californien moyen n'est pas à la fête.

65 000 ménages californiens en voie d'expulsion

Et cela ne s'est pas arrangé depuis lors : le 15 avril dernier, le courtier en immobilier RealtyTrac notait que 234 685 biens immobiliers américains faisaient l'objet d'une procédure de saisie en mars 2008, soit 5% de plus que le mois précédent et... 57% de plus qu'en mars 2007. "Un ménage américain sur 538 a reçu un avis de saisie au mois de mars", précise RealtyTrac. L'Etat américain le plus touché est le Nevada -- deux millions d'habitants -–, où un ménage sur 139 a reçu un avis de saisie en mars !

Puis c'est le tour de la Californie, où un ménage sur 204 est dans le même cas, soit "2,6 fois la moyenne nationale", note Realty Trac. Nuance de taille : près de 40 millions de personnes habitent la Californie. En clair, 65 000 ménages californiens sont sur le point de perdre leur maison, soit 21% de plus qu'en février et 106% de plus par rapport à mars 2007. Il faut être diablement optimiste pour voir dans ces chiffres une quelconque amélioration...

La fièvre (du métal) jaune

Il se trouve, cher lecteur, que tout ceci a un lien avec l'or. Historiquement, la moindre découverte de quelques pépites au fond d'un ruisseau a provoqué nombre de fièvres de l'or. Des familles abandonnant tout -- enfin, souvent, le peu qu'elles avaient -– pour une concession minière dans un coin perdu. L'Amérique du Nord en a connu plusieurs tout au long du XIXème, au cours de la "conquête de l'Ouest". Romans et films à ce sujet sont pour le moins nombreux.

Signalons que notre Jules Verne national a consacré un roman méconnu à l'un de ces accès de fièvre : Le volcan d'or relate la ruée vers l'or du Klondike, dans la province canadienne du Yukon, à la fin du XIXème siècle. Nous vous recommandons cet ouvrage, cher lecteur, c'est un Jules Verne sombre, dur, terriblement réaliste qui tient la plume, bien loin de 20 000 lieues sous les mers ou de L'île mystérieuse.


La ruée vers l'or de 1848

La Californie n'y a pas échappé. La plus célèbre ruée vers l'or de la région date de 1848. Au début de cette année-là, le contremaître d'une scierie proche de Coloma, non loin de Sacramento, découvre une belle pépite d'or. Puis une autre. Et encore une... La scierie est proche d'une rivière au nom évocateur : l'American River. Propriétaire de la scierie et d'un vaste domaine alentour, le pionnier d'origine suisse -- comme l'Agefi, tenez... -– Johann Sutter, veut d'abord garder cela pour lui. Non pas qu'il soit spécialement avide, mais il craignait que cette nouvelle ne provoque un débarquement d'aventuriers : la plus sûre manière de faire capoter ses nombreuses exploitations agricoles et sylvicoles...

Malheureusement pour lui, Johann Sutter avait raison, et cet or scella sa perte. Quelques mois plus tard, Samuel Brannan, un homme d'affaires touche-à-tout de San Francisco –- qui n'est alors qu'un gros bourg -– a confirmation de la nouvelle. Il voit tout de suite comment en tirer profit. En quelques semaines, il monte une sorte de Decathlon du parfait chercheur d'or. On y trouve en quantité pelles, pioches, tamis, tentes, etc. Une fois son échoppe ouverte, Brannan se balade dans les rues de San Francisco, une pépite en main, et crie à qui veut l'entendre : "De l'or ! C'est de l'or ! De l'or de l'American River !". Il faudra plusieurs mois pour que la nouvelle se répande –- il n'y avait alors ni Google, ni Yahoo...

A partir 1849, la Californie alors chichement peuplée connaît une gigantesque vague d'immigration. Les premiers arrivés se surnommeront les "49ers" ("les quarante-neuvièmes"). Venant du monde entier, un tiers de million de néophytes se précipiteront dans la région à la recherche du précieux métal. Qu'ils en trouvent ou non, ce n'était plus l'affaire de Brannan, qui vendait ses outils... en dollars d'or. Sa fortune était faite.

De 1848 à 2008, il n'y a qu'un pas. L'enthousiasme est le même, tout comme le sont ceux qui en sortiront gagnants ! Nous verrons cela dans le prochain Edito.

Emmanuel Gentilhomme est journaliste et rédacteur financier. Il a collaboré à plusieurs reprises avec le Journal des Finances et la Société Générale et contribue à la lettre électronique gratuite L'Edito Matières Premières . Il suit de près les marchés boursiers européens et étrangers, mais s’intéresse également à la macroéconomie et à tous les domaines de l’investissement.

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