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Les années d’austérité se suivent et se ressemblent pour les PIIGS

Les Anglais et les Irlandais aussi vont devoir se serrer la ceinture...

" Nous assistons depuis le 16 novembre à un véritable festival de prestidigitation. On nous a refait le tour une bonne douzaine de fois depuis le 19 novembre mais le public en redemande ! ", écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.

La main invisible nous montre chaque matin une paire de valets plus trois autres cartes dépareillées sans intérêt. En changeant une seule carte (choisie au hasard par le public), elle retourne chaque soir un carré de roi ou un full des as par les dames qui suscite un tonnerre d’applaudissements.

Ensuite, vu le succès de sa démonstration, elle propose aux épargnants et aux gérants de se joindre à elle pour une petite partie de poker “entre amis” à 100 euros le point — mise minimum de 1 000 euros pour le premier enchérisseur.

Et alors là, allez comprendre pourquoi, malgré sa promesse formelle de ne pas tricher (alors qu’elle se réserve le monopole de la distribution des cartes), personne ne répond à l’invitation, ou seulement deux ou trois joueurs (pigeons ou complices) qui acceptent, mais seulement parce que la partie est filmée et qu’ils vont passer à la télé (pour faire un “coucou” à tous leurs copains).

▪ La main invisible de mèche avec les faiseurs d’opinion ?
Déçue de voir aussi peu de pigeons (euh non, d’investisseurs) sortir leur portefeuille et commander des jetons, la main invisible fait jouer ses relais dans la presse et rameute tout ceux qu’elle arrose en tant que faiseurs d’opinion.

Vous ne serez pas surpris du message. Les indices grimpent depuis 18 jours et ce n’est qu’un début car c’est un mouvement perpétuel à la hausse qui vient de s’enclencher, habillages de bilans de fin d’année oblige.

Alors achetez les yeux fermés braves gens, avec nos algorithmes ça gagne à tous les coups !

Le CAC 40 va confirmer le franchissement des 3 600 points avant les chiffres du chômage américain ce vendredi et filer vers les 3 800 points pour bien finir l’année.

Les retardataires vont être obligés de payer : avec le pistolet du benchmark sur la tempe, ils ne vont pas hésiter longtemps.

Surtout, n’écoutez pas cet idiot de Béchade qui prétend “qu’une hausse de 10%, 13% ou 15% une année de récession, laquelle en précède une seconde, également placée sous le signe de l’austérité et du chômage de masse, c’est une première historique et une vertigineuse anomalie”.

Alors c’est vrai, il a raison sur un point. Ce serait effectivement sans précédent, mais c’est également la première fois que les taux longs (OAT 2022) passent sous les 2% en France.

Et c’est la première fois depuis 2008 qu’on est sûr et certain que la Zone euro ne va pas exploser !

Une fois encore, n’écoutez pas cet idiot de Béchade qui prétend que “si l’euro monte encore, au-delà des 1,3131 $, c’est le pouvoir d’achat des ménages européens — sauf celui des Allemands pour cause d’année électorale — qui va se désintégrer”.

Car l’ajustement pour répondre aux impératifs de compétitivité mondiale ne pouvant s’obtenir par la dévaluation de la devise, il se fera par les licenciements, le chômage partiel et la baisse des salaires.

▪ Les Anglais et les Irlandais aussi vont devoir se serrer la ceinture
Même les Britanniques, qui ne se privent pas d’imprimer de la livre sterling à tour de rotatives, se sont vus promettre mercredi matin une année d’austérité de plus par Georges Osborne.

Les classes moyennes et défavorisées vont devoir se serrer la ceinture jusqu’en 2018. Les plus riches vont voir leur impôt foncier augmenter — ils survivront et au besoin, ils licencieront une femme de ménage ou un de leur jardiniers.

En Irlande — prétendument bien engagée sur le chemin du redressement économique — voilà qu’une avalanche de mesures d’austérité a été soumise mardi au parlement de Dublin. Les pauvres citoyens irlandais vont continuer de subir une grêle de mauvais coups fiscaux et sociaux en 2013 et 2014.

Cela fait déjà cinq ans que ça dure et ça va durer encore quatre mois de plus. Sept ans de malheur c’est déjà une certitude… et pourquoi pas 10 comme les Grecs puisque personne ne bronche ?

Donc tout va désormais pour le mieux dans le meilleur des mondes des PIIGS ; la main invisible qui nous a orchestré la hausse entre 3 350 et 3 600 pointe désormais du doigt les 4 000 à Paris.

Pour ceux qui n’y croyaient pas, le CAC 40 a repris 0,2% au moment du fixing de clôture.

A 3 590 points, le CAC inscrit sa seconde meilleure clôture de l’année, grâce à un soudain retournement à la hausse des indices américains, aussi radical qu’inattendu.

Le S&P 500 est ainsi repassé en 45 minutes de -0,4% à +0,4% ; le Dow Jones avançait de 120 points vers 18 heures, ce que personne n’anticipait à l’ouverture.

Effet positif garanti, les places européennes sont ressorties du rouge à la dernière minute (repassant de -0,15% à +0,05%).

Les optimistes noteront que cette onzième séance de hausse sur une série de treize — un record de longévité plus observé depuis deux ans — a été marquée peu après l’ouverture par l’inscription à Paris d’un nouveau zénith annuel à 3 607, ce qui confirme la perpétuation de la tendance haussière.

▪ Les Etats-Unis éviteront-ils un lock-out ?
Wall Street a salué hier en fin d’après-midi une déclaration de la Maison Blanche qui serait disposée à proroger une loi temporaire d’inspiration républicaine (votée en juillet 2011) qui autorise le Congrès à approuver un relèvement semi-automatique du plafond de la dette américaine, de façon à éviter un lock-out — il s’agit d’une cessation de paiement temporaire qui se solde par le non versement du salaire de nombreuses catégories de fonctionnaires.

Avec un relèvement du plafond de la dette au-delà des 16 400 milliards de dollars, il est évident que la mise en oeuvre de coupes automatiques dans les dépenses à partir du 31 décembre n’aurait plus aucun objet et ce danger serait donc écarté.

Mais qui a jamais cru sérieusement que cette mesure couperet serait mise en application ?

La réponse est personne… et Wall Street a parfois joué à se faire peur, histoire de masquer le réel motif des épisodes correctifs des dernières semaines.

Il s’agit de l’anticipation d’une hausse (jugée inéluctable) de l’imposition des valeurs mobilières par le biais de la suspension des cadeaux fiscaux — impopulaires et socialement injustifiables, Warren Buffett est le premier à l’affirmer — de l’ère Bush.

Si la taxation des plus-values augmente l’an prochain, faut-il s’étonner de voir chuter Apple (de 6,4% mercredi soir) qui représente la plus colossale réserve de “valeur ajoutée” sur le marché américain ? La valeur a connu un triplement des cours ces trois dernières années (depuis janvier 2010) et une multiplication par sept depuis janvier 2009 — et c’était fois neuf mi-septembre à 705 $.

La main invisible tente déjà de faire croire que le recul de 0,77% du Nasdaq mercredi soir est un anachronisme… que les opérateurs ont perdu leur sang froid sur Apple… qu’il s’agit d’une belle opportunité de faire une relance agressive pour profiter de ce passage à vide providentiel.

Mais si la main invisible vous a servi un séduisant carré de dames, n’en doutez pas, c’est qu’elle a déjà un carré d’as !

 

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Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Directeur de la rédaction aux Publications Agora et intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la 'voix' de l'actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002. Analyste technique et arbitragiste de formation, il fut en France l'un des tout premiers 'traders' mais également formateur de spécialistes des marchés à terme.

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