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Voilà ce que l’on peut appeler une phase de marché riche d’enseignement !

Des marchés en hausse mais des croissances en berne

" Il aura fallu cinq longues semaines au CAC 40 pour passer de 3 640 à 3 780 et seulement trois jours (et deux séances de correction) pour revenir à la case départ. Les épargnants que l’on tente d’orienter par tous les moyens vers les marchés d’actions apprécieront à son juste prix ce scénario, le juste prix étant probablement un zéro pointé ! ", écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.

Pendant que Paris et Francfort basculent dans le rouge par rapport au 31 décembre 2012, les indices américains poursuivent leur marche triomphale vers leurs sommets de l’été 2007. Après une ouverture à peine négative (-0,25%), la tendance était repassée positive au moment de la clôture des places européennes.

L’Euro-Stoxx 50 recule maintenant de 0,5% sur l’année 2013. Les actions américaines rapportent entre 6% à 10% à leurs détenteurs depuis le 1er janvier, si l’on prend en compte la flambée du Dow Transportation.

▪ Des marchés en hausse mais des croissances en berne
Pour illustrer la morosité régnant dans l’Eurozone, les commentateurs évoquaient pêle-mêle Berlusconi, Rajoy, le scandale de l’Euribor (après le Libor), la rechute des valeurs télécom.

Ils se montraient beaucoup moins inspirés en ce qui concerne la perpétuation de la tendance haussière sur le S&P 500 qui se rit d’une croissance anémique au quatrième trimestre et de la désintégration du yen face au dollar (qui repasse au-dessus des 94 yens).

Il y aurait bien une explication mais sans doute la jugerez-vous tellement simpliste qu’elle ne saurait convaincre que les simplets. L’euro a pris plus de 3% depuis le 5 janvier alors que les perspectives de croissance en Europe sont quasi nulles. Pourquoi ne pas rapatrier cette différence tombée du ciel et se servir de cette manne pour soutenir coûte que coûte Wall Street, afin d’éviter l’effondrement de la pile de cubes façon Euro-Stoxx 50 ou CAC 40 lundi après-midi ?

C’est une explication un peu courte car d’autres places boursières résistent au coup de tabac baissier des dernières 72 heures. Londres (mais c’est une succursale de Wall Street, cela ne compte pas), mais aussi Zurich et les principales places nordiques… qui peuvent se targuer d’avoir des monnaies fortes.

Autrement dit, s’il apparaît clairement que les places extérieures à la Zone euro résistent bien, ce n’est pas seulement lié à un arbitrage mécaniste bénéficiant aux pays possédant une monnaie plus faible. Il semblerait qu’appartenir à la Zone euro soit considéré en soi comme un handicap !

Détruire agressivement la valeur de sa devise constitue en revanche une stratégie boursièrement gagnante. Tokyo, dopé par l’effondrement du yen contre l’euro, s’est offert un “mini-krach à la hausse” de 3,8% mercredi matin ! Un écart jamais plus observé depuis avril 2009 (alors que le yen vient de retracer son plancher d’avril 2010 à 127,7 euros).

La guerre des devises a été déclarée mi-décembre. Les bombes monétaires pleuvent sur notre commerce extérieur et nous voyons bien quelles économies se montrent les plus vulnérables, parce que jugées moins compétitives.

▪ Vous êtes le maillon faible, au revoir !
A ne considérer que le verdict des indices boursiers depuis début février, le sentiment des investisseurs, c’est bien que la France et l’Espagne sont le maillon faible dans l’Eurozone… Cependant le DAX 30 n’est pas épargné ; l’Allemagne a tout à redouter de l’offensive monétaire japonaise et de la dégradation conjoncturelle chez ses principaux partenaires.

Wall Street en revanche ne fait pas le rapprochement entre la chute du yen, la stagnation de l’activité dans la majeure partie de l’Europe et de futures difficultés à exporter pour l’économie américaine.

Alors que l’Euro-Stoxx 50 a lâché 1,3%, les indices américains n’ont cessé d’osciller au pire entre -0,25% (ouverture et mi-journée) et l’équilibre (progression de +0,05% vers 19h puis en clôture).

Un coup de pouce de dernière minute a permis à Wall Street de finir au plus haut du jour avec le Dow Jones qui grappille 0,05% (même score pour le S&P 500) et un Russell 2000 (+0,35%) qui établit un nouveau record absolu de clôture à 911,3 points.

Le mot d’ordre reste d’empêcher le doute s’installer dans l’esprit des permabulls et surtout de fournir aux vendeurs potentiels un prétexte technique pour jouer un retournement de tendance. Le diagnostic chartiste doit rester invariablement “100% haussier”.

Petite consolidation en revanche pour le Nasdaq (-0,1%) et le Dow Transportation (-0,2%)… Les opérateurs ne s’en émeuvent guère et espèrent que Mario Draghi confortera ce jeudi les stratèges qui misent sur les actions en confirmant que la Zone euro va aller de mieux en mieux au cours des prochains mois.

Comment pourrait-il en être autrement avec un yen qui vient de s’effondrer de 27% en trois mois, une France qui replonge en récession et une Espagne de nouveau sous tension avec des régions exsangues et des banques ibériques — saturées de créances irrecouvrables — qui ne doivent leur survie qu’au soutien sans faille de la BCE.

Signe des temps, certains commentaires lus sur des sites financiers américains sont particulièrement révélateurs de l’état d’esprit très particulier qui règne à Wall Street depuis quelques semaines. “Une vague de faillites personnelles et de banqueroutes — même si elle constitue un choc dur à encaisser pour les établissements de crédit américains — pourrait marquer un renouveau bénéfique pour la société américaine et le secteur bancaire”.

Car rien n’est pire pour les marché que le soupçon de “cadavres dans le placard”.

Après le scandale Monte Paschi (qui chiffre officiellement sa perte sur les dérivés à 730 millions d’euros, soit un milliard de dollars), les amendes salées qui vont être infligées aux banques qui ont manipulé les taux interbancaires et les procès pour saisies immobilières frauduleuses aux Etats-Unis, il ne manquait plus qu’une bonne opération vérité sur la solvabilité de la clientèle particulière pour restaurer la confiance dans le secteur bancaire.

Ne ratez pas cette occasion historique de rentrer dans les marchés au meilleur moment. Celui où le pire est enfin connu.

Mais si les marchés savaient VRAIMENT, ils se désintègreraient dans l’instant.

 

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Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Directeur de la rédaction aux Publications Agora et intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la 'voix' de l'actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002. Analyste technique et arbitragiste de formation, il fut en France l'un des tout premiers 'traders' mais également formateur de spécialistes des marchés à terme.

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