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Le Japon ne doit pas nous faire plonger en dépression

Moody's alerte sur la dette japonaise

, nous indique un entrefilet de L'Agefi de ce matin. Ha, voilà qui nous change un peu de la Grèce, écrit Simone Wapler de La Quotidienne de MoneyWeek.

"La faible perspective de croissance et une réponse politique inadaptée pourraient rendre plus difficile à atteindre l'objectif de réduction du déficit", dit Moody's. Qu'en termes choisis cette chose-là est dite. Le Japon est endetté à 226% de son PIB. Les Japonais vieillissent et ne souscriront plus aux emprunts d'Etat dans un curieux exercice de harakiri financier qui dure depuis plus de vingt ans. Les fonds de pension nippons doivent maintenant payer les rentes des retraités. Le taux d'épargne fond comme neige à la chaleur de Fukushima. En projetant brutalement la démographie, le Japon fait faillite en 2019.

The science of optimism, "la science de l'optimisme", tel est le titre du magazine Time de cette semaine. Il doit certainement parler des économistes et de leur "science".

Le cas japonais à la lumière de la science de l'optimisme
Souvenez-vous, pour le Japon, selon la pensée des keynésiens (ou néo-keynésiens pour plaire à Paul Jorion qui me reproche de confondre keynésiens et néo-keynésiens), un tremblement de terre puis un raz-de-marée, suivis d'un accident nucléaire était une chance inouïe, extraordinaire, de voir l'économie de ce pays rebondir. D'autant plus que la riposte keynésienne (pardon néo-keynésienne) parfaite avait suivie : 15 000 milliards de yens (132 milliards d'euros) d'injection de liquidités créées à partir de rien par la Banque centrale du Japon.

Aujourd'hui, j'ai décidé d'être cruelle et je vous livre donc un petit florilège des commentaires de l'époque :

- "Un choc économique qui sera suivi d'un rebond. [...] L'impact sur la croissance devrait rester faible sur l'ensemble de l'année.", Le Temps, le 15 mars.

- La reconstruction "apportera un supplément de croissance. En conséquence de quoi, cette année, le PIB nippon a des bonnes chances de progresser de 2%", Klaus Baader, co-directeur de la recherche économique de Société Générale Corporate & Investment Banking, dans Les Echos le 16 mars.

- L'économie du Japon, qui a été frappée en mars par un violent séisme et un tsunami, devrait "fortement rebondir", a indiqué lundi le porte-parole du groupe des principales banques centrales, Jean-Claude Trichet, à l'issue d'une réunion à la Banque des règlements internationaux (BRI). TF1 news (teneur similaire sur LCI, Le Journal du Dimanche, Europe 1) le 9 mai.

Quelques voix se sont quand même élevées pour dénoncer cet aveuglement concernant le Japon que John Mauldin a qualifié "d'insecte à la recherche d'un pare-brise".

Mon collègue Philippe Béchade fustigeait le déni de réalité des marchés dans notre numéro 125 du 31 mars :

"Les Etats-Unis de l'après-Katrina (août 2006) connurent-ils plus de croissance ? La Nouvelle-Zélande de l'après-séisme du 4 mars 2011, le Japon de l'après-tsunami du 11 mars seront-ils plus riches qu'avant ces catastrophes ou, simplement, beaucoup plus endettés ?"

"Avec la perte de 15 à 20% de sa capacité de production énergétique liée à l'arrêt temporaire ou définitif de plusieurs centrales nucléaires qui ont subi des dommages (non compris celle de Fukushima), le recul du PIB nippon sera-t-il aussi marginal et ponctuel que de nombreux experts le prétendent ?"

"Imaginez les conséquences en France de la neutralisation de la Basse-Normandie d'où s'échapperait un nuage radioactif prenant la direction du Havre et de Rouen (évacuation des habitants sur 80 km), de la Beauce (arrêt de la production maraîchère et céréalière) puis de Paris (l'eau y serait tantôt déclarée consommable, tantôt non), avec de fréquentes coupures de courant en Île-de-France, mais également à Lyon, perturbant la production et les transports durant des mois".

"Imaginez que 5% de la population française soit contrainte de migrer vers le sud du pays, alors qu'EDF et les autorités déclarent que la situation reste totalement imprévisible pour une période indéterminée (plus aucune transaction immobilière, plus aucun investissement, plus aucun touriste au nord de la Loire)."

Le Japon est en récession et maintenant les avertissements se succèdent
"Si tous les experts avaient prédit une forte dégradation des performances de l'économie japonaise au premier trimestre de l'année, peu pensaient que ce recul serait aussi sévère. Hier, le gouvernement nippon a annoncé que le produit intérieur brut (PIB) du pays avait reculé de 3,7% en rythme annualisé sur les trois premiers mois de l'année. Techniquement, le Japon, qui avait déjà mesuré une baisse de 3% de son économie au cours du trimestre précédent, est officiellement entré en récession, même si les autorités de Tokyo rechignent encore à prononcer le mot car la qualification des cycles économiques est réservée, dans l'Archipel, à la responsabilité d'un comité d'experts", Les Echos du 20 mai.

La dernière petite touche noire est donc l'alerte de Moody's.

Ce qui me ramène au Time et à sa science de l'optimisme : "l'espoir n'est pas rationnel, alors pourquoi sommes-nous programmé pour cela ?", s'interroge le magazine qui poursuit "les lunettes roses ? Nous sommes nés avec".

Ne cherchez pas plus loin... toutes les causes de la crise sont là, dans notre cervelle, juste dans le rostre antérieur du cortex frontal.

"Sans un mécanisme neuronal qui engendre un optimisme irréaliste, tous les êtres humains seraient légèrement déprimés".

Mais figurez-vous que "les optimistes ont tendance à travailler plus longtemps, à gagner plus d'argent et même à épargner plus".

Incroyable ! La fourmi serait donc optimiste et la cigale dépressive ?

Nous sommes pourtant persuadés qu'à la longue vous montrer pessimiste vous permet d'être gagnant dans vos investissements. Pourquoi ? Tout simplement parce que la clé du succès ne réside pas dans les gains hors norme, mais plutôt dans la méthode permettant de limiter ses pertes.

C'est pourquoi nous aimons nous préparer au pire. Mais nous savons être optimistes : nous espérons bien qu'il ne se produira pas...

Simone Wapler est analyste, journaliste et ingénieur de formation. Elle a déjà contribué à des publications telles que Le Point, Enjeux, Les Echos, Chart's... Spécialisée dans les valeurs industrielles, les matières premières, les énergies, l’or, les minières Simone Wapler est passionnée par et les investissements « tangibles ». Elle analyse chaque mois le secteur aurifère et les marchés étrangers dans la lettre d'investissement Vos Finances - La Lettre du Patrimoine et elle intervient régulièrement dans l'Edito Matières Premières ou dans différents rapports d’investissements.

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