AAA : Amérique, à ton tour de souffrir...

Hier a été la journée des "ahah !"

. Ahah, nous avions raison ! Ahah, tout se passe exactement comme nous l'avions prévu. Mais aussi, ahahah !, ces sacrées agences de notations...écrit Cécile Chevré pour La Quotidienne de MoneyWeek.

Que s'est-il passé hier pour que nous nous soyons ainsi transformés en une bande de mouettes rieuses ?

Eh bien, l'or n'est plus qu'à quelques encablures des 1 500 $ l'once. Nous avons mis les bouteilles de champagne au frais et nous guettons le franchissement de ce seuil symbolique.

Ahah, la dette des Etats-Unis commence à sérieusement donner des sueurs froides aux marchés. Hier, ils ont décroché comme un seul homme. Car – je me tiens les côtes de rire – l'agence de notation Standard & Poor's a émis un "avis négatif" sur la dette des Etats-Unis.

Qu'est-ce qu'un avis négatif ? Pas en grand-chose en fait. Standard & Poor's prend des pincettes pour annoncer qu'un jour peut-être, si cela continue comme cela – et encore –, la note AAA des Etats-Unis pourrait être dégradée. Une probabilité qui est même estimée : 1 chance sur 3 dans les deux ans à venir.

Ouh là, quelle nouvelle ! Les Etats-Unis, perdre le fameux AAA qui les estampille emprunteurs sûrs ? Mais comment est-ce possible ?

Eh bien, Standard & Poor's s'inquiète de l'ampleur des déficits américains et l'apparente incapacité du gouvernement à le réduire. Il faut dire que la très récente bataille pour l'adoption du budget laisse entrevoir la difficulté de parvenir à un accord sur les finances publiques en ce moment.

Dans moins d'un mois, la dette américaine devrait atteindre le plafond des 14 300 milliards de dollars. L'actuel budget nécessite un relèvement du plafond de la dette de 20,8 milliards d'ici 2016. Le plan budgétaire du sénateur républicain Paul Ryan adopté vendredi dernier par la Chambre des représentants nécessite un relèvement de 19,5 milliards de dollars.

Et pourtant, Standard & Poor's maintient toute sa confiance aux Etats-Unis, qui conservent leur AAA. Quel crédit accorder aux agences de notations ? Aucun. Ceux qui les prennent au sérieux ne sont manifestement pas échaudés par les exploits passés des agences de notation qui avaient attribué sans sourciller le fameux AAA aux pires produits dérivés et actifs pourris de la planète finance avant 2008.

Les déclarations de Standard & Poor's au sujet de la santé de l'économie américaine sont de ce point de vue un cas d'école : "Notre notation des Etats-Unis est maintenue grâce à ses recettes élevées, son économie diversifiée et flexible soutenue par une politique monétaire prudente et crédible. Notre notation prend aussi en compte les avantages uniques découlant de la position prééminente du dollar par rapport aux autres devises".

Ahahah... Effectivement, il y a de quoi être rassuré par la "politique prudente" de la Fed. Des milliards de dollars créés de toutes pièces pour racheter des obligations, c'est exactement ce que nous entendons par une politique monétaire prudente. Une inflation galopante – quoi qu'en dise Bernanke et consorts –, une banque centrale en faillite...

Et que dire de la prééminence du dollar sur les autres devises alors qu'il n'en finit plus de dégringoler et de se dévaluer ?

Comme d'habitude, les agences de notations arrivent après la bataille avec leur bataillon de grandes annonces. Ils nous mettent en garde contre une future faillite de l'économie américaine ? Mais elle est déjà presque accomplie !