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Métaux Et Pétrole vs. Céréales : Tout Le Monde N'Est Pas Logé à La Même Enseigne

Un article de Gene Epstein paru dans Barron's le week-end dernier annonce

que les prix des matières premières pourraient chuter d'au moins 30%, voire de 50%. Epstein souligne ce qu'il pense être l'influence des fonds indiciels sur les prix des matières premières. Il établit la liste d'un certain nombre de facteurs qui, selon une poignée d'analystes, devraient faire baisser les prix des matières premières cette année, écrit Dan Denning pour La Chronique Agora.

"Selon une estimation", écrit Epstein, "les fonds indiciels représentent désormais 40% des paris haussiers sur les matières premières. Les jus spéculatifs sont encore plus abondants -- près de 60% des positions haussières -- si vous comptez les paris placés par les 'bassins' traditionnels de matières premières".

L'argument selon lequel il y aurait une "bulle" des prix des matières premières n'est pas nouveau. Il est basé sur une preuve concrète : les fonds indiciels qui suivent les prix des matières premières représentent près de 200 milliards de dollars US en positions haussières sur les marchés des options et des futures sur les matières premières. Alors que les fonds ont permis aux petits investisseurs de prendre facilement des positions longues sur les ressources naturelles, Epstein prétend que "l'argent intelligent", les traders commerciaux et les producteurs eux-mêmes, parient sur une chute des prix.

La position exposée dans l'article de Barron's affirme que la hausse du prix des matières premières est due à la spéculation plus qu'à l'augmentation de la demande chinoise -- au moins depuis septembre dernier. Selon Epstein, "l'analyse des positions de couverture commerciales de l'analyste Steve Briese l'amène à penser que les matières premières en général étaient bien valorisées, en termes de fondamentaux, début septembre 2007. Si l'on se base sur l'Indice Goldman Sachs Commodity, qui compte 24 matières, cela signifierait une chute de 30% par rapport aux niveaux actuels".

D'autres facteurs qui, selon Epstein, pourraient faire chuter le prix des matières premières : un redressement du dollar US (ce qui réduirait la demande en matières premières libellées en dollars), une non-récession dans l'économie américaine (qui permettrait une rotation hors des valeurs matières vers d'autres secteurs), moins d'achats par les fonds indiciels puisque la chute du prix de l'or et du pétrole entraînerait une redistribution de l'argent institutionnel, et une baisse de la demande chinoise.

Tous ces scénarios sont possibles.

Pourtant, difficile de réconcilier la théorie de la "bulle" des matières premières avec la réalité de l'augmentation des prix des commodities dans l'économie réelle à cause de la demande et de la rareté, et non pas de la spéculation financière. Par exemple, le riz thaï de gamme moyenne est passé de 360 $ la tonne l'année dernière à 760 $ la tonne la semaine dernière. Voici d'autres exemples :

Le Ministre de l'Agriculture Russe a brusquement imposé des tarifs douaniers sur les engrais minéraux contenant du nitrogène, du phosphore et du potassium. Les tarifs douaniers visent à rendre les engrais plus abordables pour les céréaliers locaux et à combattre ainsi l'augmentation mondiale du prix des céréales.

Le gouvernement chinois a augmenté ses dépenses agricoles de 36% l'année dernière pour tenter d'atténuer la déstabilisation politique engendrée par l'augmentation du prix de la nourriture. Le gouvernement a augmenté le prix du blé et du riz de 10% pour encourager la production locale et éviter le stockage. Le premier ministre chinois, Wen Jiabao, a affirmé que l'agriculture était "la priorité des priorités".

Les vendeurs de riz indiens ont commencé à stocker leur production dans l'attente de prix encore plus élevés. "Le prix du riz va certainement continuer à grimper... les principaux exportateurs de riz, le Vietnam et l'Inde, confirmaient qu'ils allaient réduire les ventes à l'étranger afin de combattre l'inflation sur la nourriture", selon arabnews.com.

Quand les pays commencent à imposer des tarifs douaniers sur des matières premières essentielles, il en résulte deux conséquences principales. D'abord, les prix augmentent au fur à mesure que le potentiel marchand mondial d'une matière première décline. Ensuite, cela souligne le caractère physique essentiel de la matière première : soit vous en avez, soit vous n'en avez pas. Et si vous n'en avez pas assez, vous limitez son exportation.

Une augmentation du prix de la nourriture ou une véritable pénurie de nourriture sont des problèmes politiques sérieux pour les gouvernements du monde entier. Cela suppose que le plafond des prix des céréales -- d'après l'offre historique la plus basse -- est très haut.

Prétendre que la baisse des cours des matières premières industrielles, comme les métaux de base et le pétrole, n'est qu'une répétition générale pour une baisse des prix des matières premières périssables et des céréales serait ignorer les composantes physiques des prix élevés (et 2,3 milliards de personnes qu'il faut bien nourrir).

Plutôt que d'argumenter sur une chute générale des matières premières suite à une spéculation financière réduite, nous serions plus sélectifs et dirions qu'il faut être pointilleux sur quels prix des ressources sont durables, et quels prix peuvent être sujets à une correction massive.

Prédédemment rédacteur du Strategic Investment conjointement avec Lord William Rees-Mogg, Dan Denning est un analyste en investissement indépendant basé à Melbourne, d'où il rédige l'édition australienne du Daily Reckoning. Il est aussi l'auteur du best-seller The Bull Hunter (Wiley & Sons) et correspondant pour les Publications Agora à Paris.

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