L’emploi inconnu aux Etats-Unis… mais en hausse en Allemagne
Les marchés y croient, en tout cas...
" Ah, le cyclone Sandy… On nous avait promis une nuit de cauchemar sur la Côte est — et on ne nous a pas menti : ce fut un cauchemar… mais surtout pour les cameramen chargés de glaner des images susceptibles de nous glacer les sangs ! ", écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.
Les médias du monde entier nous ont passé en boucle des images de destructions terribles : un érable abattu dans Central Park, un auvent publicitaire renversé dans la 42ème rue, un tunnel inondé près de l’East River, le chantier de Ground Zero transformé en cascade et une façade d’immeuble de trois étages arrachée quelque part dans l’île de Manhattan.
L’immeuble devait être tellement mal entretenu et le bois tellement pourri que même les vibrations du métro ou le claquement de la foudre auraient pu déclencher un effondrement un soir d’orage. C’est une chance que les rues aient été désertes du fait de cette sorte de couvre-feu… et nous parions que les assureurs vont étudier très attentivement l’état général du bâtiment en question.
Alors bien sûr, il y a ces images impressionnantes d’une grue dont la flèche a été pliée au sommet d’une tour en cours d’achèvement. On peut quand même se demander ce qui a cloché avec son arrimage, car à Hong Kong, qui encaisse typhon sur typhon, nous n’en avons pas vu une seule — même d’apparence plus fragile — qui ait subi une avarie, même perchée à 200 mètres du sol (et il y en a des dizaines qui fonctionnent en bordure de la Baie, face aux tempêtes).
Mais l’économie subit bien les effets des coupures de courant qui affectent huit millions d’Américains ! Oui certes, mais lorsque des chutes de neige précoces et des pluies verglaçantes avaient paralysé la moitié des Etats-Unis fin octobre 2011 (y compris le New Jersey, qui s’en souvient ?), ce sont des millions d’Américains qui avaient été privés d’électricité durant des jours avec en prime un froid glacial qui avait fait de nombreuses victimes parmi les sans-abris… pourtant, Wall Street n’avait pas été fermé.
En 2005, l’ouragan Katrina n’avait même pas interrompu la partie de golf de Georges Bush mais peu importe puisque “W” ne pouvait pas se représenter pour un troisième mandat.
▪ On reprend les bonnes habitudes…
La campagne électorale 2012 devrait reprendre dès ce mercredi soir, tout comme les échanges à Wall Street. En ce qui concerne le décompte des chômeurs, en revanche, personne n’est plus sûr de rien.
La publication des statistiques de l’emploi US du mois d’octobre pourrait être reportée au-delà du 7 novembre. Cela pourrait éviter que les statisticiens du département du Travail nous infligent un bidonnage encore plus consternant qu’en septembre, avec l’éradication, en un clic de souris, de plus d’un million de citoyens — pourtant en pleine possession de leurs moyens — de la population active.
Sans oublier une progression fulgurante et non élucidée des embauches de salariés d’origine asiatique : une chaîne de fast-food chinois ou de bars à sushi aurait-elle ouvert ses portes de façon furtive sur l’ensemble du territoire américain ?
En ce qui concerne le Japon, la banque centrale va étendre ses rachats de créances nippones : nous en sommes au neuvième ou dixième assouplissement quantitatif depuis 15 ans… nous ne savons plus très bien, tant ces injections de liquidités s’avèrent de plus en plus inefficaces pour relancer la croissance.
La Banque centrale japonaise a d’ailleurs révisé à la baisse mardi matin ses prévisions de croissance, de 2,2% à 1,5% pour l’exercice 2012/2013… et il est clair que le boycott chinois des produits nippons — et notamment des automobiles importées — va coûter cher au pays du Soleil-Levant.
▪ L’Europe va mieux ?!?
En Europe en revanche, la “croissance négative” (selon le célèbre oxymore de Christine Lagarde du temps où elle était ministre des Finances) aurait tendance à ralentir : le PIB de l’Espagne ne se serait contracté que de 0,3% en termes réels au troisième trimestre (contre -0,4% au deuxième) alors que les ventes de détail se sont littéralement effondrées (de -9% en rythme annuel).
Moins les Espagnols consomment, plus l’activité remonte ! C’est magique ! Et vous allez voir que ce n’est pas un cas isolé puisque le ralentissement économique devrait également être moins prononcé en Italie qu’au second trimestre.
Beaucoup d’Italiens manifestent contre la perte de leur pouvoir d’achat et le matraquage fiscal… Dommage : qui va les croire maintenant que des experts nous affirment que tout va mieux ?
Nos voisins allemands, en revanche, n’ont pas le moral : alors que la plupart des médias européens titrent sur la hausse des salaires après des années d’austérité, voilà que le nombre de chômeurs a augmenté de 20 000 au mois d’octobre 2012, selon les données corrigées de variations saisonnières de l’agence fédérale du travail… un chiffre deux fois supérieur aux attentes des économistes.
Il faut croire que les investisseurs n’ont retenu que les estimations — pas du tout sujettes à caution — du type “ce sera moins pire que prévu” au sud de l’Europe.
▪ Les marchés y croient, en tout cas
La tendance haussière était au rendez-vous à Paris et sur les places voisines dès les premiers échanges. Elle s’est renforcée à la hausse (+1,35% en moyenne) suite à l’annonce par la Grèce d’un accord avec ses créanciers (UE, BCE, FMI) sur un programme de réduction de 13,5 milliards d’euros des déficits.
Il reste toutefois à obtenir le feu vert du Parlement grec, car de nombreuses mesures d’économies (pas moins de 150) sont très impopulaires et vigoureusement combattues, y compris par certains membres de la coalition au pouvoir.
Les investisseurs sont convaincus que les députés et ministres grecs — grassement payés — feront comme d’habitude : ils enterreront au dernier moment les promesses faites à leurs électeurs pour s’assurer de conserver leur fauteuil et leur traitement de VIP jusqu’en 2014, ce qui pourrait ne pas être le cas si une motion de défiance venait à faire tomber le gouvernement Samaras.
Non, soyez tranquilles, les médias sont convaincus que l’Europe n’a rien à craindre de la démocratie grecque. Elle est de celles dont rêvent bien des dirigeants de par le monde : le peuple vote massivement contre l’austérité mais leurs représentants — sous la pression des marchés — adoptent toutes les lois qui anéantissent leur pouvoir d’achat et enterrent des décennies de conquêtes sociales.