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Ecoutez ceux qui “savent” sur l’or… et faites juste l’inverse !

L’achat d’or n'est pas un investissement de “bourrin”

" Nous scrutons fébrilement nos graphiques depuis une semaine, cherchant à déterminer ce que le ratio volumes/volatilité induit sur l’évolution de l’or et quels niveaux techniques pourraient se prêter à des rachats tactiques (trois à six mois) ou stratégiques (trois à six ans) ", écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.

Comme nous l’expliquions hier, “nous ne sommes ni des savants ni des historiens de l’or”. Nous accueillons avec beaucoup d’ouverture d’esprit tous les avis que nous trouvons sur internet ou que nos fidèles lecteurs jugent bon de nous adresser.

Nous n’avons pas encore réussi à déterminer ce que l’or fera ces trois prochaines semaines ou ces trois prochains trimestres… mais nous savons d’ores et déjà ce qu’il ne fera pas, et c’est déjà énorme !

L’or n’ira pas à 800 $ (“sa vraie valeur”) comme le prétend Mark Hulbert, un des éditorialistes vedettes du Wall Street Journal.

? Comment en sommes-nous si sûr ?
Tout d’abord parce que les meilleurs connaisseurs du métal précieux n’ont jamais eu la prétention de détenir une méthode permettant de fixer sa “vraie valeur”.

Il s’agit d’un minerai dont la terre se montre de plus en plus avare et dont le coût d’extraction est de plus en plus élevé. En dehors de rares mines où la teneur reste supérieure à cinq grammes par tonne de roche (prix de revient voisin de 600 $), le coût de production d’une once s’avère le plus souvent supérieur à 1 000 $ (avec des teneurs voisines de 1,5g/tonne)… et à 850 $ en moyenne d’après certains experts.

Nous imaginons difficilement — contrairement à M. Hulbert — une once d’or tombant en-deçà de ses coûts de production. Nous accueillons donc avec beaucoup de scepticisme son jugement selon lequel l’achat d’or est un investissement de “bourrin”, d’épargnant mentalement attardé qui n’a rien compris au fonctionnement des monnaies et des circuits financiers “modernes”.

Si c’était vrai, Ben Bernanke — qui a tout compris et possède même une longueur d’avance sur le commun des mortels — aurait dû profiter de l’envol du métal précieux au-dessus des 1 500 $ pour liquider les 8 000 tonnes d’or qui constituent le stock de la Fed.

Mais que fait donc la banque centrale américaine avec cette masse de métal inutile et obsolète au fond de ses caves ? S’en sert-elle pour aplatir les liasses de billets qu’elle imprime à raison de quatre milliards de dollars par jour ?

Pourquoi l’Allemagne a-t-elle demandé le 15 janvier le rapatriement de ses réserves en or physique des Etats-Unis vers les rives du Rhin (la Buba est basée à Francfort) ? Parce qu’elle a l’absolue certitude de ne pas être envahie par la Russie… ou parce qu’elle n’est plus très sûre que la Fed soit encore en mesure de la livrer ?

Et pourquoi la Fed a-t-elle demandé un délai de sept ans pour s’exécuter alors qu’il ne s’agit que de 675 tonnes d’or au total ? Est-ce parce que l’achat de 100 tonnes par an peut s’effectuer beaucoup plus discrètement que 500 tonnes (l’équivalent de ce qui s’est traité sur le marché du “physique” lundi) ?

? Or à 1 300 $ et coup de tabac sur le CAC 40
Pour l’heure, la plupart des détenteurs de métal précieux se moquent de savoir si la Buba reverra son or d’ici 2020. Ils aimeraient surtout savoir si leur propre métal jaune vaudra 1 600 $ ou 1 000 $ avant la fin de l’année.

Nous faisons le pari que l’once s’inscrira au milieu de cette fourchette d’ici peu de temps vu la timidité du rebond observé hier, avec une clôture pas convaincante à 1 375 $/once.

Après le séisme historique des 12 et 15 avril, nous redoutons une puissante réplique au cours des jours ou même des heures à venir. A plus forte raison en cas d’accélération des liquidations qui viennent de s’enclencher sur le compartiment actions en Europe, avec un CAC 40 qui dévisse sans crier gare de -2,35%, avec à la clé une cassure symbolique du palier des 3 600 points.

Rien ne préfigurait un tel coup de tabac. C’est le piège parfait dans la mesure ou l’actualité de ce mercredi ne contenait pas d’évènements ou statistiques négatifs pouvant expliquer cette vague de liquidation (les volumes ont largement dépassé les 4,3 milliards d’euros à Paris).

? L’Allemagne dégradée !
Quel est le catalyseur de la baisse, sinon une nébuleuse de rumeurs dont au moins une est confirmée : la dégradation de la note de l’Allemagne par l’agence Egan Jones. Rappelons que cette agence s’était rendue célèbre en dégradant la note des Etats-Unis fin juillet 2001 avant d’être interdite de notation des emprunts d’Etat US pour 18 mois par la SEC le 22 janvier dernier.

Rassurez-vous, les marchés obligataires allemands, les premiers concernés, n’accordaient aucun crédit au scénario d’une perte du AAA allemand chez Moody’s, Fitch ou Standard & Poor’s. Le Bund a même vu son rendement chuter de 1,28% vers 1,23% en fin de journée.

Oublions donc Egan Jones. Son influence — et en l’occurrence sa capacité de nuisance — ne peuvent pas expliquer le sell off qui précipité le CAC 40 au contact des 3 599 points en quelques heures avec de gros volume d’échanges, ce qui traduit le surgissement d’une véritable pression vendeuse.

Le palier de soutien des 3 600 (plancher moyen terme des 31 décembre 2012 et du 7 et 26 février derniers) aura du mal à tenir compte tenu du puissant signal baissier validé par l’Euro-Stoxx 50 sous 2 610. Il faut également compter avec la clôture en forte baisse de l’ensemble des indices américains, qui ont reperdu le terrain gagné la veille.

? Les sherpas sont à l’oeuvre
Les sherpas de Wall Street se sont simplement employés à stabiliser les écarts autour de -1,5% à partir de la mi-séance. Le S&P 500 a lâché 1,43% avec 672 millions de titres, ce qui se rapproche des 700 millions de lundi. Le Nasdaq a lui chuté de 1,83% dans le sillage d’Apple — qui a fait à mi-séance une incursion sous les 400 $ pour la première fois depuis novembre 2011, avant d’en terminer en repli de 5,5% à 402,8 $.

Si l’on en croit nombre de commentateurs, les gérants auraient été profondément affectés (les pauvres biquets !) par la révision à la baisse des perspectives de croissance mondiale par le FMI : 3,3% en 2013 contre 3,5% prévu en janvier, et 4% en 2014 contre 4,1% estimé initialement.

Comme si les stratèges les mieux informés de la planète découvraient que l’activité ralentit en Chine, en Inde et en Russie… qu’elle sera négative en Europe (la France pourrait afficher entre -0,5% et -1%, loin des prévisions gouvernementales de quasi-stabilité)… et que les entreprises américaines se préparent à un sérieux coup de frein au second semestre 2013.

Après avoir semé la panique sur les marches de matières premières, les sherpas de Wall Street espèrent ramasser la mise. Ils redoublent leur campagne de propagande en faveur des actions dont les cours redeviennent extraordinairement attractifs (2,5% en-deçà des sommets).

La bourse avale tous les obstacles, se rit de la récession, offre des rendements mirobolants (certes en baisse depuis deux trimestres mais qu’importe), surperforme l’or de près de 30% depuis six mois.

Mais les épargnants ont décidément beaucoup de mal avec un concept tel que “les actions rapportent moins qu’avant le QE3 mais il faut les payer plus cher”.

Quant à l’or, ils conviennent certes qu’il ne rapporte rien… mais il n’a pas de dette et ne risque pas d’être victime d’un défaut de paiement ou d’une décote comme la plupart des émissions obligataires des PIGS.

 

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Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Directeur de la rédaction aux Publications Agora et intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la 'voix' de l'actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002. Analyste technique et arbitragiste de formation, il fut en France l'un des tout premiers 'traders' mais également formateur de spécialistes des marchés à terme.

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