Après la France, les Etats-Unis et l’Italie mettent la pression sur Merkel
Berlin est à nouveau critiqué...
" Le CAC 40 plonge de pratiquement 3% en 48 heures. La cassure des 3 100 points — même en réintégrant les coupons versés depuis 10 jours — est avérée, tout comme l’est l’enfoncement sans ambiguïté du support des 2 200 sur l’Euro-Stoxx 50. Il affichait 1,15% mardi à 2 178 points, après un plus bas en séance inscrit à 2 170 points ", écrit Philippe Béchade pour La Chronique Agora.
La rupture baissière semble nette et sans bavure. Mais il y a une faille dans le scénario : où sont donc passés les volumes qui gonflent souvent de 30% à 50% avec le déclenchement en cascade des ventes stop en de pareilles circonstances ?
Même les valeurs bancaires, sur lesquelles les ventes à découvert sont redevenues possibles, ne se désintègrent pas comme au mois d’août et septembre 2011.
Tous les chartistes valident la chute du CAC 40, mais il n’y a pas de ruée des vendeurs !
Symétriquement, il est bien difficile de prétendre que le CAC 40 à 3 020 points est trop survendu pour aller plus bas — les oscillateurs hebdomadaires sont en effet au tapis. L’absence de volumes ne caractérise aucunement le genre de sell-off qui marque souvent la fin d’un mouvement de correction moyen terme.
▪ Qui tend un piège aux vendeurs ?
Pour ceux qui avaient les 3 000 points ou les 2 970 points (plancher de clôture du 16 décembre) en ligne de mire, il n’y a plus grand-chose à gagner à la baisse. En effet, le CAC 40 se situe maintenant à 20% de ses sommets de la mi-mars.
En revanche, pour ceux qui prennent les graphiques au pied de la lettre, sous les 3 100 points, l’objectif moyen terme redevient 2 871 points (gap haussier du 25 novembre dernier).
La question qui nous taraude depuis lundi matin (et la première incursion de l’Euro-Stoxx 50 sous les 2 200 points) est la suivante : quelques influents opérateurs ne seraient-ils pas en train de tendre un piège aux vendeurs ?
Vu l’avalanche de nouvelles consternantes en provenance de la Grèce, vu la récession qui se répand à travers l’Europe, vu la croissance qui décline en Asie, l’affaire aurait dû être pliée dès le début de la semaine dernière.
Pourquoi les indices ont-ils obstinément refusé de se laisser glisser le long de la pente conjoncturelle… et de prolonger la tendance baissière qui s’est amorcée mi-mars ?
Quand le mouvement haussier s’est enclenché fin décembre, aucune mauvaise nouvelle, aucune incertitude sur la santé des banques espagnoles n’a jamais ralenti la hausse somnambulique des indices boursiers — et cela a duré 13 interminables semaines !
Il ne leur en a fallu que sept pour effacer la totalité des gains accumulés en trois mois, sans que les réservistes de la hausse ne se manifestent. Vous savez, ces cohortes d’investisseurs qui n’avaient pas compris à quel point l’avenir économique était radieux puisque la crise grecque ou espagnole allait être résolue par la magie des LTRO.
▪ Les marchés sont déçus par la tournure du dossier grec
Le CAC 40 a désormais reperdu 550 points mais il n’y a toujours aucun acheteur à l’horizon. Il faut reconnaître que l’échec des négociations à Athènes tombe très mal : les chefs de partis politiques grecs convoqués depuis le week-end pour la constitution d’un gouvernement de technocrates ne sont pas parvenus à trouver un compromis.
Même si les marchés ne fondaient pas d’espoirs démesurés, ils ont manifesté une franche déception vers 15h en apprenant que la Grèce se préparait à de nouvelles élections mi-juin. L’issue semble tout aussi incertaines que celles du 6 mai dernier, comme l’a souligné le patron du Pasok (et ex-ministre de l’Economie), Evangelos Venizelos.
La désillusion vécue de ce côté-ci de l’Atlantique a semblé épargner Wall Street dans un premier temps… Mais tout comme lundi, les bonnes dispositions affichées à la mi-séance n’ont pas tenu la distance.
Les marchés américains ont succombé aux vents contraires venus d’Europe tout au long de l’après-midi. Pourtant, l’actualité conjoncturelle s’est avérée plutôt porteuse en interne, tant du point de vue de l’activité manufacturière (10 points dans la région de New York) qu’immobilière, avec l’indice du moral des constructeurs de maisons individuelles en hausse inespérée de cinq points.
La volatilité intraday s’est avérée plus intense qu’au cours des séances précédentes avec par exemple un écart de 40 points sur le Nasdaq et de 150 points sur le Dow Jones. Ce dernier a culminé vers 12 760 points avant d’en terminer pratiquement au plus bas à 12 630 points.
L’indice du stress (VIX) a grimpé jusque vers 22,7 en séance, inscrivant son plus haut niveau depuis le début de l’année 2012, bien loin du plancher des 13,66 de la mi-mars.
Le VIX se retrouvait mardi soir à la croisée des chemins. Soit le sentiment d’insécurité s’étiole et l’indice retombe sous les 20, soit le cap des 23 est franchi et plus rien ne devrait l’arrêter avant la zone des 30.
Il y aurait vraiment de quoi redouter ce second scénario si le mouvement de repli ne semblait un peu en bout de course. Mais la franche cassure du support des 1 343 points par le S&P (-0,57% à 1 330) induit également un risque de rechute immédiate vers 1 285 points.
▪ La Fed et la BCE vont-elles devoir envoyer un message encourageant aux marchés ?
Si ce genre de correction s’enclenche, ce sera un signal très négatif pour Wall Street et la Maison Blanche à tout juste six mois des élections présidentielles. Le moment est peut-être venu pour la Fed, mais également la BCE, d’envoyer un message encourageant aux marchés.
Les banques centrales n’ont jamais manqué de le faire lorsque la situation menaçait de déraper. C’est d’ailleurs à nouveau le cas avec un dollar qui se renforce brusquement face à l’euro, vers 1,2730 hier contre 1,2860 ce matin.
Il leur est difficile d’agir à chaud alors que Berlin restait sur sa ligne dure pour la première visite du président français, accordant la priorité à la réduction des déficits.
▪ Berlin est à nouveau critiqué
Berlin se retrouve de plus en plus isolé sur la scène économique internationale car Barack Obama et Mario Monti ont uni leurs voix mardi soir pour souhaiter plus de croissance et plus d’emploi. Cela constitue un très clair signal de soutien à la stratégie de François Hollande… et un désaveu implicite de la rigidité d’Angela Merkel en matière de relance.
Mais il est plus facile de décréter qui a raison ou tort que de décréter la croissance. Tous les expédients keynésiens classiques ont échoué depuis 2008, les mesures non-conventionnelles également, (quantitative easing et LTRO)… il ne semble plus rester que le vaudou et la magie noire !
Si cela implique d’imprimer plus d’argent, Ben Bernanke devrait y être très favorable.