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Angela, ma soeur, que vois-tu venir ? Notre faillite...

Cette Quotidienne aurait pu s'appeler

"Dernières nouvelles des enfers, n°300".

Autant vous prévenir, cher lecteur, nous allons commencer par une longue litanie de mauvaises nouvelles. Mais, je vous le promets, nous terminerons sur une note positive, écrit Cécile Chevré pour la Quotidienne d'Agora.

Pourquoi tant de pessimisme ? Eh bien, parce qu'il n'y a pas tant d'optimisme que cela à se mettre sous la dent. Du côté de l'Europe, cela ne s'est évidemment pas arrangé pendant le week-end.

Les rendements européens en hausse et la France menacée
Premier achoppement, les rendements sont en hausse. Les rendements des obligations à 10 ans espagnoles ont touché les 6,8% la semaine dernière, ceux de l'Italie ont dépassé les 7%. Ceux de l'Irlande, de la Grèce et du Portugal ont depuis longtemps dépassé ce seuil.

Une flambée qui ne concerne malheureusement pas que les PIIGS. Les rendements des obligations françaises ont eux aussi grimpé. Ils ont atteint 3,64% la semaine dernière. Cela peut paraître peu... mais ils n'étaient que de 2,44% il y a deux mois.

Et surtout, ils sont près de 2 points supérieurs aux rendements allemands pour la même période.

La menace d'une dégradation de sa note souveraine pèse donc de plus en plus lourdement sur la France. "Pour Moody's, le triple A de la France reste sous pression", nous apprend Le Monde. "L'agence de notation Moody's Investors Service revient à la charge sur le triple A de la France. 'Des coûts de financement élevés et persistants pourraient accroître les difficultés que le gouvernement français rencontre, conjuguées à une perspective de croissance qui se détériore, avec des implications de crédit négatives', selon Moody's. Des 'implications de crédit négatives' signifient une potentielle baisse de la note du pays, actuellement Aaa, la meilleure possible".

Signe de plus que la contagion est en marche : les rendements de pays qui, jusque-là, s'étaient tenus loin de la mêlée, comme les Pays-Bas, l'Autriche ou la Finlande, sont maintenant en hausse.

La BCE, notre sauveteur de dernier ressort ?
Deuxième point d'achoppement, la question de l'impression monétaire. Angela Merkel reste fermement campée sur sa position : elle refuse que la BCE achète massivement la dette des pays en difficulté – achats qui ne peuvent se faire qu'en imprimant de la monnaie.

La BCE de Mario Draghi tient, officiellement, le même discours. Dans les faits, c'est un peu différent. La BCE a dû racheter de la dette italienne ces derniers jours pour éviter un embrasement.

Pendant combien de temps Merkel et la BCE pourront-ils éviter un quantitative easing à l'européenne ? Nicolas Sarkozy fait pression pour la BCE puisse intervenir sans limites, comme ses consoeurs la Fed, la Banque d'Angleterre ou la Banque du Japon...

Jusqu'à présent, la BCE rachetait assez d'obligations pour éviter la catastrophe. Une politique dont les effets sont limités. Elle a certes empêché – pour le moment – une faillite officielle et désorganisée de la Grèce mais elle n'a pas réussi à contrôler la contagion de la crise.

Or plus la pression obligataire augmente sur les pays difficulté et atteint les pays qui jusque-là y avaient échappé, plus il devient difficile pour la BCE de ne rien faire.

L'Allemagne mise en cause
Notre voisin d'outre-Rhin n'est pas en odeur de sainteté dans les médias ces derniers temps. Accusée de couler la zone euro, l'Allemagne est le dernier bouc-émissaire de la crise.

"Et si l'Allemagne n'était pas si exemplaire...", s'interrogeait Le Monde ce week-end. Apparemment, l'Allemagne aurait légèrement triché sur ses chiffres : "'Son déficit est honteusement truqué !', dénonce Sylvain Broyer, économiste chez Natixis. Et de développer : après le choc de 2008, le pays a eu recours à une tactique légale, mais peu éthique, pour comptabiliser les dizaines de milliards d'euros déboursés (ou offerts en garanties) afin de relancer son économie et sauver son secteur financier".

"Les sommes, poursuit M. Broyer, ont été logées dans un fonds spécial "Sondervermögen" qui a contribué à faire grossir la dette mais n'est pas pris en compte dans le calcul du déficit public. Sans cette astuce le déficit allemand en 2009 n'aurait pas été de 3,2% mais de 5,1%, calcule Natixis. Un niveau comparable à celui de la France..."

Règlement de compte à OK Corral...

La faiblesse de l'Allemagne n'est pas une bonne nouvelle alors que la croissance des pays de la zone euro pique tristement du nez. Elle s'affiche à seulement 0,2% au troisième trimestre 2011, et devrait continuer à ses niveaux en 2012.

Or ce sont les pays de la zone euro qui financent la BCE. Si leurs difficultés financières s'aggravent l'Institution de Francfort ne pourra plus grand-chose.

Les Etats-Unis, discrets, mais dans la panade
Avec tout cela, on en oublierait presque que cela ne va pas si bien de l'autre côté de l'Atlantique. Or une nouvelle menace de dégradation pèse sur les Etats-Unis, comme le rapporte le Guardian (via Slate.fr).

Bis repetita de ce qui s'est passé en août : républicains et démocrates ne parviennent toujours pas à se mettre d'accord sur le (les) moyen(s) de réduire le déficit américain. L'été dernier, une commission bipartite a été créée. Sa mission : réduire de 1 200 milliards de dollars les dépenses sur les 10 prochaines années. Et elle doit rendre ses conclusions ce soir. Or aucun accord n'a été trouvé pour le moment.

Certaines rumeurs persistantes font état d'un blocage complet qui pourrait conduire la commission à renoncer à trouver des solutions. Ce qui laisse présager d'une nouvelle dégradation de la note souveraine américaine.

Autant vous dire que cela risque de sérieusement secouer sur les marchés dans les prochains jours.

Et la bonne nouvelle maintenant ?
Car, oui, il y a une bonne nouvelle : les banques centrales ont acheté 148 tonnes d'or au troisième trimestre 2011. C'est environ deux fois plus que ce qu'elles avaient acheté au cours du troisième trimestre 2010 !

Qui sont les banques acheteuses ? Celles qui en ont les moyens, c'est-à-dire les banques centrales asiatiques et d'Amérique latine. Et elles achètent de l'or exactement pour les mêmes raisons pour lesquelles nous vous conseillons depuis des années d'en acheter : pour vous protéger !

Dans tous les cas, ces achats massifs sont une bonne nouvelle : ils soutiennent durablement le cours de l'or.

Cécile Chevré est titulaire d’un DEA d’histoire de l’EPHE et d’un DESS d’ingénierie documentaire de l’INTD. Cécile Chevré participe à la rédaction de la Quotidienne de MoneyWeek, un éclairage lucide et concis sur tous les domaines de la finance.

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