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L'empire américain en crise économique... et impériale

Wall Street a subi son premier recul en huit jours

, la semaine dernière. L'or a grimpé, le dollar a chuté, écrit Bill Bonner pour La Chronique Agora.

Plus important, on a appris que le taux d'inflation continuait à chuter aux Etats-Unis. Les prix à la production ont chuté de 0,8% ces deux derniers mois -- et le taux de déclin va en s'accélérant. Il ne faudra pas longtemps avant que les Etats-Unis ne sombrent dans la déflation pure et simple -- comme le Japon.

Et voilà une petite chose intéressante. Le Washington Post rapporte que les saisies immobilières devraient atteindre un nouveau record cette année -- à plus d'un million.

Voilà qui signale que les "D" sont encore au pouvoir. La Déflation. Le Défaut de paiement. Le Désendettement. La Dépression.

Vous en voulez un autre ? Que pensez-vous de "Déclin" ? Que voulons-nous dire par là ? Nous parlons de l'état de l'empire anglo-saxon.

Attendez une minute. Les Etats-Unis sont toujours la première puissance mondiale, non ?

Oui... dans le sens où ils peuvent, en théorie, botter le derrière d'à peu près n'importe qui au monde. Enfin, si les Chinois leur en laissent le loisir. Ils détiennent une telle quantité de dollars et d'obligations américaines que s'ils décidaient de s'en débarrasser, l'Amérique se retrouverait dans un beau pétrin. Parce qu'elle ne paie pas assez d'impôts pour financer ses programmes sociaux et le Pentagone en même temps. Elle ne peut pas se le permettre. Alors les gentils Chinois lui prêtent de l'argent.

Mais pas d'inquiétude. Les Chinois ont promis qu'ils ne se débarrasseraient pas des obligations américaines. Et on peut être certain qu'ils tiendront cette promesse aussi longtemps qu'ils le voudront bien.

Pour autant que nous en sachions, aucun empire forcé d'emprunter de l'argent à ses rivaux n'a duré très longtemps. L'Angleterre s'était mise dans cette position durant la Première Guerre mondiale. Elle ne pouvait se permettre les coûts de fonctionnement de l'empire -- dont le coût gigantesque de la guerre elle-même. Elle emprunta donc aux Etats-Unis. Les Allemands empruntèrent eux aussi aux prêteurs américains. Mais les prêteurs de l'Angleterre avaient plus d'argent à New York et plus de pouvoir à Washington. Les Etats-Unis entrèrent donc en guerre aux côtés de la Grande-Bretagne plutôt que de l'Allemagne.

Ensuite, durant la Seconde Guerre mondiale, lorsqu'un général américain fut nommé à la tête du Débarquement, il apparut clairement que l'Angleterre avait cédé la position de chef de meute aux Etats-Unis. Ce fut un transfert amical, obtenu par la force de l'économie plutôt que par celle des armes. Les Etats-Unis n'ont pas eu besoin de vaincre l'Angleterre de manière militaire ; il leur avait suffi de la financer.

Quelques années plus tard, durant la crise de Suez, la Grande-Bretagne apprit ce que c'était que d'être une puissance subordonnée. Elle découvrit qu'elle ne pouvait plus jouer les gros bras sans le consentement des Etats-Unis.

Mais il s'agit là du front militaire. Chez eux, les Britanniques découvrirent qu'ils étaient pauvres... et qu'ils s'appauvrissaient encore. Sous le poids des programmes d'aide sociale qui allaient en s'alourdissant et d'un empire en déclin, l'économie britannique s'affaissait. Ses anciens alliés -- la France et les Etats-Unis -- connurent un boom durant les années d'après-guerre. Il en allait de même pour ses anciens ennemis, le Japon et l'Allemagne. En peu de temps, ses amis étaient plus riches et plus puissants... et ses adversaires aussi.

Le taux de croissance de la Grande-Bretagne était tout juste positif. Le pays a pataugé durant les années 50, 60 et 70... avec des grèves, des pénuries, des rationnements et des pannes d'électricité.

Votre correspondant se rappelle sa première visite, en 1971. Londres était sombre. L'Angleterre semblait être un pays déprimé, arriéré. Il restait des vestiges de l'empire dans des endroits publics -- des statues, des inscriptions, des monuments en l'honneur de héros qui s'étaient battus et étaient morts dans des endroits que peu de personnes sauraient localiser sur une carte. Dans les endroits privés -- comme les chambres d'hôtel -- la vie était morose et froide. Les radiateurs électriques fonctionnaient grâce à des pièces insérées dans un mécanisme. Sinon, on devait se contenter de frissonner, au milieu du papier peint fleuri et des tapis élimés. On pouvait encore prendre un bon thé au Savoy, et acheter un costume fait main à Saville Row. Mais comme le disait Katharine Hepburn au sujet des acteurs vieillissants, la Grande-Bretagne "vendait son être en voie de dégradation".

Est-ce ce qui attend les Etats-Unis, et dans une large mesure l'ensemble de l'Occident... un déclin post-impérial où le niveau de vie stagne... l'économie boite... et où notre rang dans le monde s'effrite ?

Oui. Très probablement.

Pourquoi ? Parce que le gouvernement prend un rôle de plus en plus vaste dans l'économie. Parce que les programmes sociaux sont de plus en plus coûteux. Parce que nous n'avons pas assez d'argent pour les payer. Parce que trop peu d'argent est investi dans des activités productives. Parce que le fardeau militaire est trop lourd... et difficile à éviter. Parce que nous n'avons pas d'épargne. Parce que nous allons probablement passer les dix prochaines années à rembourser la dette privée. Parce que le reste du monde a pris une bonne longueur d'avance. Parce que nous vieillissons. Parce que nos dirigeants sont corrompus et incompétents. Et parce que toute l'économie se zombifie de jour en jour.

Bill Bonner est le fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information confidentielles – probablement l'une des plus brillantes au monde. Auteur de la lettre e-mail quotidienne The Daily Reckoning (450.000 lecteurs... ), il intervient également dans La Chronique Agora, directement inspirée du Daily Reckoning.

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