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C'est Armageddon, aujourd'hui ?

“Tu ne peux pas savoir combien je suis contente

d’avoir vécu aussi longtemps”, a déclaré notre mère, dont nous fêterons le 90e anniversaire dans trois semaines. “Je verrai deux grandes dépressions de mon vivant”.

Il y a des années de ça, nous avions émis l’hypothèse que le prix de l’or et le prix du Dow allaient converger. Nous avions également supposé qu’ils se rencontreraient aux alentours des 3 000, écrit Bill Bonner pour La Chronique Agora.

Tout ça semblait insensé à l’époque. Le prix de l’or n’était que de 500 $ l’once environ, tandis que le Dow avait dépassé les 10 000… et continuait de grimper. Ce qui mettait le ratio Dow/or à 20 pour 1… bien loin du sommet de 43 pour 1 fixé à la fin des années 90.

Nous avons dit que le ratio passerait à 1 pour 1. Une once d’or vaudrait trente actions du Dow… comme cela avait été le cas, très brièvement, à la fin des années 70. Quand est-ce que ça se produirait ? Nous n’en savions rien. Mais lorsque ça arriverait, ça donnerait l’impression qu’Armageddon était arrivé.

Eh bien, ça ne semble plus aussi insensé. Pour revenir à un plus bas de marché baissier, le Dow doit être divisé par deux… et plus. Il suffirait pour ça de deux semaines similaires à la semaine dernière.

Le prix de l’or pourrait facilement doubler lui aussi. En fait, il ne retrouvera pas son sommet de 1980 — correctement ajusté à l’inflation — avant de frôler les 3 000 $. Et cette fois-ci, il pourrait aller bien plus haut. Quel que soit le problème que signalait l’or à la fin des années 70, il est pire aujourd’hui. Il y a bien plus de dette. Plus de volonté de la part des autorités de “monétiser” cette dette. Plus d’économies vacillantes gérées par des économistes chancelants.

Le vrai problème, c’est la dette. Elle s’accumule depuis plus d’un demi-siècle — grâce aux encouragements des officiels entre les mains desquels le problème se trouve désormais.

Les autorités pensent… ou ont pensé… pouvoir régler le ralentissement exactement comme elles ont résolu toutes les autres récessions d’après-guerre : en ajoutant plus de crédit, toujours plus facile. C’est-à-dire en augmentant la quantité de dette dans le système.

Les politiciens ont essayé les dépenses directes — les stimulants budgétaires. Ils ont essayé de regonfler les banques. Ils ont mis les taux directeurs à zéro. Et Bernanke affirme maintenant qu’il les laissera là pendant encore deux ans ! Ils ont même essayé l’impression monétaire — avec les programmes QE1 et QE2.

Rien n’a fonctionné. Aux Etats-Unis, on trouve moins de gens ayant un emploi aujourd’hui qu’avant le début de la crise. Les salaires réels baissent. Les prix des maisons baissent. Le pays a le pourcentage de personnes au travail le plus bas jamais enregistré. Les riches deviennent peut-être plus riches… mais les pauvres deviennent plus pauvres plus rapidement que jamais. Et le PIB per capita réel du secteur privé continue de baisser.

Bernanke a dit un jour en plaisantant que s’il lui arrivait de se trouver dans une telle situation, il saurait quoi faire : larguer des dollars par hélicoptère.

Il est temps de faire chauffer les rotors !

Mais les autorités commencent à réaliser qu’il ne suffit pas d’offrir plus de cash et de crédit ; elles doivent aussi s’occuper de la dette. Enfin, nous pensons qu’elles commencent à le réaliser. Plusieurs grands économistes se sont récemment exprimés dans la presse en faveur d’une réelle liquidation de la dette en plus de mesures de relance supplémentaires. Tant Nouriel Roubini que Ken Rogoff ont écrit pour soutenir des initiatives de restructuration (réduction) de la dette. Et même des têtes de linotte comme Thomas L. Friedman ont enfin réalisé que la dette est un problème.

“Toute cette dette a explosé en 2008″, écrit-il, “… et cela a mené au deuxième problème : les ménages, les entreprises, les banques et les gouvernements sont en train de se ‘désendetter’, ou au moins d’essayer — ce qui signifie qu’ils épargnent plus, dépensent moins, remboursent leurs dettes et essaient de déterrer ceux de leurs prêts hypothécaires qui sont sous l’eau”.

C’est typique. Il s’emmêle les pinceaux. On ne peut rien déterrer quand on est sous l’eau. On se noie. Mais au moins commence-t-il à comprendre ce qui se passe. Et dans la mesure où il est le dernier homme sur terre à comprendre quoi que ce soit… il est probable que même les autorités commencent à piger.

Et donc ? Eh bien, on commencera à entendre parler de réduction de dette en plus des mesures de relance. Les autorités forceront les banques à déprécier les prêts hypothécaires, par exemple, en échange de liquidités de la part du gouvernement. C’est un tour de passe-passe politique classique. La dette ne disparaît pas. Jamais. Elle doit être prise en compte. Transmettre les dettes hypothécaires au gouvernement enfonce le gouvernement. Et ça aussi devra être pris en compte.

Mais pas aujourd’hui, cher lecteur. Les prêteurs achètent toujours de la dette US. A mesure que le Dow baisse, l’or et les obligations grimpent. Cela donne pas mal de mou aux autorités US. Elles n’ont pas besoin de réduire les dépenses américaines. Elles peuvent encore renflouer qui bon leur semble. Elles peuvent emprunter, emprunter, emprunter… dépenser, dépenser, dépenser… jusqu’à ce que Papa confisque les clés de la voiture !

Ensuite, elles pourront utiliser toute cette corde pour se pendre.

Bill Bonner est le fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information confidentielles – probablement l'une des plus brillantes au monde. Auteur de la lettre e-mail quotidienne The Daily Reckoning (450.000 lecteurs... ), il intervient également dans La Chronique Agora, directement inspirée du Daily Reckoning.

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