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Le "déflationnisme doux" et ce qu'il signifie pour l'or

Nous écrivons cette chronique dans l'avion

survolant le Canada, de retour vers Paris. Nous avons déjà traversé les Rocheuses. Au-dessous, nous apercevons un patchwork de rectangles et de carrés. Ils sont vert clair... plutôt bleu-vert pour certains... voire d'un jaune tirant sur le vert. Parsemé de lacs et entrecoupé de routes, l'endroit semble plat et isolé, écrit Bill Bonner pour La Chronique Agora.

Que font les gens dans une telle région ? Ce sont des agriculteurs, bien entendu. Mais vivent-ils dans ces minuscules boîtes, posées à côté des carrés ? Est-ce qu'ils montent dans leur camionnette pour aller se balader ? Où s'approvisionnent-ils ? Où vont-ils dîner ou boire un verre ? Nous ne voyons aucun signe de ville... juste de longues routes isolées, se poursuivant à perte de vue.

Il n'y a pas d'arbres. Pas de collines. Pas de parcs. Pas de villes.

Voilà une demi-heure que nous volons au-dessus de cette zone, à plus de 750 km/h. Et nous voyons toujours les mêmes carrés de champs... mais sans signes de culture. On dirait un terrain vague. Toujours pas de ville. Où font-ils leurs courses ? Où vont-ils faire réparer leur voiture ? Comment font-ils pour ne pas devenir fous ?

Combien d'argent gagnent-ils ? Est-ce que leur femme les quittent pour partir avec le vendeur d'engrais ? Est-ce que leurs filles fuguent à Winnipeg ?

Peut-être qu'ils gagnent tellement d'argent que l'isolation ne les dérange pas. Ils plantent ; ils récoltent -- puis ils partent à Miami pour les mois d'hiver. Ou peut-être qu'ils se rassemblent avec leurs voisins et mènent une vie sociale animée... avec des orchestres locaux, de la danse jusqu'à minuit, des petits-déjeuners au champagne et de l'échangisme ? Qui sait.

Attendez... voici peut-être une ville. Ou une décharge. Ou un cimetière. Impossible à dire. En tout cas, c'est un assemblage de choses brillantes, une petite dizaine, peut-être...

Rien ne bouge. En fait, nous n'avons pas vu une seule automobile ou un seul tracteur en mouvement. On dirait qu'il n'y a rien à faire, là-dessous, sinon grimper dans sa voiture et se promener -- sauf que personne ne le fait. Alertez la police montée. Il se passe des choses bizarres sur le plancher des vaches...

Peut-être que toute la région a été envahie par des zombies.

Mais nous allons devoir interrompre notre journal de voyage et revenir à nos moutons : l'argent. L'économie. La finance.

Il y a deux grandes écoles de pensée sur ce qui nous attend... ainsi que deux autres écoles renégates. Il y a ceux qui pensent que nous avons une reprise... bien que faible... qui se poursuivra et ramènera finalement l'économie à la vie. C'est la ligne adoptée par l'administration Obama et la majeure partie des économistes grand public.

Et puis il y a ceux qui pensent que la reprise ne se produira pas comme prévue... que les efforts de la Fed pour déclencher une reprise -- ainsi qu'une demande vigoureuse de la part de l'Asie et des marchés émergents -- mèneront à des niveaux élevés d'inflation, détruisant le dollar et les obligations. C'est ce que prévoit Marc Faber. Il conseille d'éviter d'investir trop lourdement en liquidités, puisqu'elles pourraient être les premières victimes de l'inflation. Mieux vaut s'intéresser aux actions et à l'immobilier, dit-il.

Une troisième ligne de pensée est ce que Faber appelle "le déflationnisme dur" -- représentée par Robert Prechter et Gary Shilling. Selon eux, le désendettement sera catastrophique -- menant à la déflation pure et simple et portant le Dow sous les 1 000 points, par exemple.

Et puis il y a la ligne de la Chronique Agora. On peut l'appeler "déflationnisme doux" :

1. il n'y a pas de reprise ; il n'y aura jamais de reprise ;
2. la période de désendettement sera plus longue et plus dure que le pensent les gens... menant à des poussées de déflation et des doubles... voire triples... creux ;
3. les autorités lutteront avec toutes les armes disponibles ;
4. cependant, ils n'appuieront pas sur le "bouton nucléaire" -- l'impression illimitée de devises -- avant que le marché obligataire ne craque ;
5. ce dernier ne craquera d'ailleurs pas tout de suite, parce que les autorités sont incompétentes ; elles n'arriveront pas à obtenir des taux d'inflation plus élevés -- du moins pas de sitôt ;
6. le dollar restera vigoureux. Les obligations vont grimper... pour l'instant ;
7. le Dow chutera, mais pas sous les 1 000... et probablement pas sous les 5 000.

Qu'est-ce que tout ça signifie pour l'or ? Eh bien, ça veut dire que l'or ne connaîtra pas une hausse spectaculaire. Il pourrait décliner... disons jusqu'à 850 $ environ.

Mais le marché haussier de l'or finira par reprendre, toutefois. On ne peut pas maintenir un bon métal au plancher. Simplement, ne vous attendez pas à le voir effectuer une grimpée spectaculaire pendant que le secteur privé réduit ses dettes de manière ordonnée.

Est-ce que ça signifie que vous devriez vendre votre or ? A votre place, nous ne le ferions pas. Parce qu'il peut arriver que quelque chose tourne très mal. Une autre grande faillite bancaire. Un effondrement en Chine. Il ne faudrait pas grand-chose pour provoquer une panique. Les investisseurs pourraient se tourner vers l'or pour la sécurité.

Ou peut-être que les autorités vont paniquer... et larguer des dollars par hélicoptère, comme avait averti Ben Bernanke.

De toute façon, nous pouvons nous tromper. Les prédictions sont toujours difficiles à faire... surtout quand elles concernent l'avenir.

Bill Bonner est le fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information confidentielles – probablement l'une des plus brillantes au monde. Auteur de la lettre e-mail quotidienne The Daily Reckoning (450.000 lecteurs... ), il intervient également dans La Chronique Agora, directement inspirée du Daily Reckoning.

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